Le pacte commissoire est une clause du droit des sûretés qui permet au créancier de devenir propriétaire d’un bien gagé en cas de défaut de paiement du débiteur. Longtemps prohibé, il a été légalisé par l’ordonnance du 23 mars 2006, mais demeure strictement encadré. En pratique, il représente une alternative efficace à la saisie judiciaire — mais aussi un terrain à haut risque juridique lorsqu’il est mal utilisé. Une rédaction imprécise ou une application sur un bien protégé peut entraîner la nullité du contrat pour cause de pacte commissoire déguisé. Cet article complet vous explique les règles légales, les interdictions, les différences avec la vente à réméré, ainsi que les décisions de justice récentes qui ont façonné la jurisprudence 2025.
Qu’est-ce qu’un pacte commissoire ?
Le pacte commissoire est une clause contractuelle prévue à l’article 2348 du Code civil, introduite par l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 relative au droit des sûretés. Elle autorise le créancier à devenir propriétaire du bien gagé si le débiteur ne respecte pas son obligation. En d’autres termes, le pacte commissoire permet d’éviter la procédure de saisie en attribuant directement la propriété du bien au créancier. Voir la définition complète sur le Dictionnaire juridique.
Le cadre légal du pacte commissoire
Les textes de référence
Le pacte commissoire est défini par plusieurs textes :
- Article 2348 du Code civil : possibilité de transfert de propriété en cas de non-exécution,
- Article 2452 du Code civil : interdiction sur la résidence principale,
- Articles L622-7, L631-14 et L641-3 du Code de commerce : interdiction dans les procédures collectives,
- Article L312-38 du Code de la consommation : exclusion dans le cadre d’un crédit à la consommation.
Les conditions de validité
Pour être valable, le pacte commissoire doit :
- être expressément prévu dans l’acte de gage ou d’hypothèque,
- être consenti librement par les deux parties,
- ne pas porter sur la résidence principale du débiteur,
- faire l’objet d’une publication au service de publicité foncière pour être opposable aux tiers.
Voir aussi l’analyse du 118ᵉ Congrès des notaires de France.
Pacte commissoire et vente à réméré : une frontière fine
La confusion entre pacte commissoire et vente à réméré est fréquente. La vente à réméré (articles 1659 à 1673 du Code civil) est une vente temporaire avec faculté de rachat, tandis que le pacte commissoire est une clause de transfert automatique en cas de non-paiement. Lorsqu’une vente à réméré mal structurée masque en réalité un prêt déguisé, elle peut être requalifiée en pacte commissoire prohibé et annulée.
Exemple jurisprudentiel :
- Cass. civ. 3e, 21 mai 2014, n° 12-23.607 (Lexbase)
- La Cour de cassation a jugé que la simple concomitance d’un acte de prêt et d’une vente ne suffit pas à prouver la fraude, mais que la disproportion entre les prix et la volonté d’éluder les règles sur l’usure peuvent révéler un pacte commissoire déguisé.
Voir aussi : Vente à réméré et pacte commissoire
Le pacte commissoire et les procédures collectives
Le Code de commerce interdit toute conclusion ou réalisation d’un pacte commissoire après l’ouverture d’une procédure collective :
- En sauvegarde : article L622-7, I, alinéa 3,
- En redressement judiciaire : article L631-14,
- En liquidation judiciaire : article L641-3.
Ces dispositions protègent les créanciers concurrents : aucun ne peut s’approprier un bien du débiteur en dehors du cadre collectif.
Les précautions à prendre avant de conclure un pacte commissoire
Faire rédiger la clause par un notaire
Le notaire doit s’assurer :
- que la clause ne porte pas sur un bien protégé,
- que le débiteur comprend les implications,
- que la valeur du bien est évaluée par un expert indépendant.
Prévoir une clause d’évaluation
En cas d’exécution, le créancier doit restituer au débiteur la différence entre la valeur réelle du bien et le montant de la dette garantie.
Éviter la confusion avec un contrat de prêt déguisé
Une vente ou un transfert à titre de garantie peut être sanctionné s’il vise à contourner la réglementation sur le crédit ou l’usure. Chez PraxiFinance, chaque opération impliquant une clause de garantie fait l’objet d’une analyse notariale approfondie et d’un contrôle de conformité juridique, afin d’exclure tout risque de requalification ou de nullité.
Jurisprudence récente sur le pacte commissoire
- Cass. civ. 3e, 24 juin 2021, n° 18-19.771 : une vente à réméré requalifiée en pacte commissoire car elle dissimulait un prêt à caractère usuraire sur la résidence principale.
- Cass. civ. 3e, 21 mai 2014, n° 12-23.607 : la Cour rappelle qu’une requalification ne peut résulter que d’un faisceau d’indices précis et concordants.
- CA Aix-en-Provence, 17 avril 2012, n° 11/08204 : nullité d’un montage contractuel assimilé à un pacte commissoire.
Analyse complète sur Wikipédia.
FAQ – Pacte commissoire
Qu’est-ce qu’un pacte commissoire ?
C’est une clause permettant à un créancier de devenir propriétaire du bien gagé si le débiteur ne rembourse pas sa dette (article 2348 C. civ.).
Le pacte commissoire est-il autorisé ?
Oui, sauf lorsqu’il porte sur la résidence principale, un crédit à la consommation ou en cas de procédure collective.
Quelle différence entre pacte commissoire et vente à réméré ?
Le pacte commissoire transfère automatiquement la propriété en cas de défaut ; le réméré laisse au vendeur le droit de rachat à un prix convenu.
Le pacte commissoire s’applique-t-il aux biens immobiliers ?
Oui, à condition qu’il ne s’agisse pas de la résidence principale et qu’il soit inscrit à la publicité foncière.
Que risque-t-on en cas de pacte commissoire déguisé ?
La nullité du contrat et, dans certains cas, des sanctions pour usure ou abus de faiblesse.
Peut-on insérer un pacte commissoire dans une hypothèque ?
Oui, mais uniquement sur des biens professionnels ou secondaires, sous encadrement notarial strict.
Comment se déroule l’exécution du pacte commissoire ?
En cas de défaillance, le notaire constate le transfert de propriété au profit du créancier et la libération du débiteur, après vérification de la valeur du bien.
À retenir
Le pacte commissoire est un outil juridique puissant, mais strictement encadré par la loi.
S’il est mal utilisé, il peut être annulé pour cause de pacte déguisé ou de prêt usuraire.
Un accompagnement professionnel et une validation notariale sont indispensables pour sécuriser ce type d’opération.


