L’hypothèque judiciaire est une garantie réelle immobilière accordée à un créancier par décision de justice. Elle lui permet d’obtenir une sûreté sur les biens immobiliers de son débiteur, en cas de non-paiement d’une dette reconnue judiciairement. Instrument de sécurité essentiel dans le droit des sûretés, l’hypothèque judiciaire protège le créancier tout en respectant les droits patrimoniaux du débiteur.
Définition de l’hypothèque judiciaire
Une sûreté d’origine judiciaire
L’article 2412 du Code civil définit l’hypothèque judiciaire comme celle qui résulte d’une décision du juge.
Elle permet à un créancier, sur la base d’un jugement, d’une ordonnance ou d’un titre exécutoire, de garantir le paiement de sa créance par une sûreté réelle sur un ou plusieurs immeubles du débiteur.
En d’autres termes, elle ne naît pas d’un contrat (comme l’hypothèque conventionnelle), mais d’un acte juridictionnel.
Objectif de l’hypothèque judiciaire
Son objectif principal est d’assurer la sécurité du créancier : si le débiteur ne rembourse pas, le créancier hypothécaire peut faire vendre le bien et se faire payer en priorité sur le prix.
Cette priorité est régie par le principe du rang d’inscription : plus l’inscription est ancienne, plus le créancier est prioritaire.
Les différentes formes d’hypothèque judiciaire
L’hypothèque judiciaire provisoire
L’hypothèque judiciaire provisoire est une mesure préventive.
Elle peut être demandée avant toute décision définitive, lorsqu’un créancier dispose de présomptions sérieuses quant à l’existence de sa créance.
Conformément à l’article 2123 du Code civil et à l’article R. 511-1 du Code des procédures civiles d’exécution, le juge peut autoriser une inscription provisoire pour éviter la dilapidation des biens par le débiteur.
Cette hypothèque n’est pas définitive : elle doit être confirmée par un jugement dans les délais fixés par la loi, faute de quoi elle devient caduque.
L’hypothèque judiciaire définitive
Elle découle d’un jugement passé en force de chose jugée (c’est-à-dire non susceptible d’appel ou de recours).
Dès lors, le créancier dispose d’un titre exécutoire lui permettant d’inscrire une hypothèque judiciaire définitive au service de la publicité foncière.
Elle produit alors tous les effets d’une hypothèque classique : droit de préférence et droit de suite.
Conditions et procédure d’inscription
Le titre exécutoire
L’inscription d’une hypothèque judiciaire suppose la possession d’un titre exécutoire :
- jugement du tribunal judiciaire,
- ordonnance de référé,
- décision arbitrale exécutoire,
- acte notarié ayant force exécutoire (article L. 111-3 du Code des procédures civiles d’exécution).
L’acte d’inscription
L’inscription s’effectue auprès du service de la publicité foncière du lieu de situation du bien immobilier.
Le créancier doit y déposer un bordereau d’inscription comportant :
- les noms et domiciles du créancier et du débiteur,
- le titre exécutoire,
- la désignation précise du bien,
- le montant de la créance garantie (capital, intérêts et accessoires).
L’inscription confère à l’hypothèque son caractère opposable aux tiers et détermine son rang de priorité.

Effets juridiques de l’hypothèque judiciaire
Le droit de préférence
L’hypothèque judiciaire confère au créancier un droit de préférence sur les autres créanciers.
En cas de vente du bien hypothéqué, le créancier hypothécaire est payé avant les autres, selon le rang de son inscription (article 2465 du Code civil).
Le droit de suite
Ce droit permet au créancier de poursuivre le bien en quelques mains qu’il se trouve.
Ainsi, si le débiteur vend l’immeuble, le créancier conserve le droit de saisir le bien entre les mains du nouvel acquéreur, jusqu’à extinction complète de la dette.
L’effet conservatoire
Même si le débiteur change de situation, l’hypothèque judiciaire reste attachée au bien.
Elle protège le créancier contre les actes de disposition ou de dissimulation de patrimoine.
Durée et extinction de l’hypothèque judiciaire
Durée légale
Conformément à l’article 2434 du Code civil, l’inscription d’une hypothèque judiciaire est valable 10 ans à compter de sa date.
Elle peut être renouvelée avant son expiration pour maintenir ses effets.
Extinction
L’hypothèque judiciaire s’éteint dans les cas suivants :
- paiement intégral de la dette,
- mainlevée consentie par le créancier,
- radiation judiciaire ordonnée par le juge,
- prescription du titre exécutoire,
- vente forcée de l’immeuble.
La mainlevée doit être publiée au service de la publicité foncière pour effacer définitivement l’inscription.
Coût d’une hypothèque judiciaire
Les frais sont composés de :
- frais de procédure et d’avocat,
- frais d’inscription au service de la publicité foncière (taxe de publicité foncière, contribution de sécurité immobilière),
- frais notariés pour la rédaction et la vérification des actes,
- frais de mainlevée après remboursement.
Le coût global varie généralement entre 1,5 % et 3 % du montant de la créance garantie.
L’hypothèque judiciaire et la saisie immobilière
L’hypothèque judiciaire constitue la première étape d’une procédure de saisie immobilière.
En cas de non-paiement, le créancier peut engager la procédure d’exécution forcée, après commandement de payer valant saisie.
Le produit de la vente de l’immeuble servira à rembourser prioritairement le créancier hypothécaire, conformément aux articles L. 311-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution.

FAQ – Hypothèque judiciaire
Qu’est-ce qu’une hypothèque judiciaire ?
C’est une sûreté immobilière accordée par décision de justice au profit d’un créancier. Elle permet de garantir une dette sur un ou plusieurs immeubles appartenant au débiteur.
Quelle est la différence entre une hypothèque judiciaire et une hypothèque légale ?
L’hypothèque judiciaire est décidée par un juge, tandis que l’hypothèque légale découle directement de la loi (par exemple au profit du vendeur ou de l’État).
Qui peut demander une hypothèque judiciaire ?
Tout créancier muni d’un titre exécutoire ou d’une décision de justice condamnant le débiteur à payer une somme d’argent.
Combien coûte une hypothèque judiciaire ?
Entre 1,5 % et 3 % du montant garanti, en incluant les frais de justice, de publicité foncière, d’acte notarié et de radiation.
Quelle est la durée d’une hypothèque judiciaire ?
Elle est valable 10 ans à compter de l’inscription et peut être renouvelée avant expiration.
Comment lever une hypothèque judiciaire ?
Le créancier doit donner mainlevée une fois la dette remboursée, ce qui permet la radiation de l’inscription au fichier immobilier.
L’hypothèque judiciaire bloque-t-elle la vente d’un bien ?
Non, mais l’acquéreur devra racheter ou purger l’hypothèque avant de pouvoir obtenir un titre libre de toute charge.
Conclusion
L’hypothèque judiciaire est une arme juridique puissante mise à la disposition des créanciers. Elle assure une garantie solide sur les biens immobiliers du débiteur, tout en respectant un cadre légal strict.
Bien qu’elle implique des formalités et des frais, elle demeure un outil efficace de sécurisation des créances et un levier de recouvrement dans les contentieux civils et commerciaux.


